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Le médium Roberson aux résines mastic et copal |
Malgré des qualités indéniables de manipulation et de siccativité, on reproche parfois aux médiums de type Maroger une certaine fragilité du fait de l'utilisation de la résine mastic comme l'un de leurs composants majeurs. Le mastic, effectivement, comme le dammar d'ailleurs, est une résine tendre. Comme telle, il ne faut donc pas en abuser. C'est pourquoi, entre autres dans nos modes d'emploi, nous en fixons les dosages à ne pas dépasser. Il faut quand même remarquer que l'huile cuite, autre composant majeur de ces médiums, est extrêmement résistante par elle-même et compense ainsi la relative fragilité de cette résine.
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"Tempête en mer" par William Turner :
une écriture incisive, typique du médium Roberson, obtenue par la superposition de glacis transparents sur des empâtements opaques |
L'idée de renforcer les médiums huile cuite / résine mastic avec une résine dure est, cependant, venue à l'esprit de certains.
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John Singer Sargent : une liberté très maîtrisée
L'alliance réussie entre un virtuose de la brosse et un médium particulièrement performant |
Ainsi, dans les années 1810, un fabricant londonien de produits picturaux, Charles Roberson, mit au point un médium qui associait huile cuite, résine mastic et résine de copal dur.
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John Singer Sargent : une matière à la fois fluide et onctueuse, caractéristique du médium Roberson |
De cette manière, il combinait les caractéristiques de thixotropie et siccativité du médium huile cuite / résine mastic, à celles de dureté et résistance de la résine copal.
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James Abbott McNeill Whistler : "Nocturne in black and gold"
L'alternance de la fluidité sans que les glacis ne coulent et de pâtes plus opaques |
Son médium eut les faveurs de nombreux artistes anglo-saxons dont Turner et Sargent, peintres à la virtuosité bien connue, mais aussi de Whistler et d'un certain nombre de peintres du mouvement préraphaélite. Tous ont apprécié les qualités de transparence et de brillant, mais aussi d'onctuosité et de fluidité sans coulant, de siccativité progressive et de dureté finale du médium Roberson.
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Un médium tout à la fois thixotrope
et remarquablement résistant |
Le médium Roberson Atelier des Fontaines
A la suite de Charles Roberson, nous proposons une version Atelier des Fontaines de ce médium, particulièrement agréable à l'emploi et remarquablement résistante. C'est un médium que nous utilisons nous-même avec plaisir, très couramment. Employé seul, en technique "gras sur maigre", ou en alternant médium et émulsion en technique mixte "maigre sur gras", il permet une variété étonnante d'effets en toute sécurité.
Comme dans la recette originelle, à laquelle nous sommes fidèles, une petite quantité d'essence de lavande aspic apporte à ce médium une onctuosité, un moelleux supplémentaires, prolonge son temps d'ouverture et améliore le mouillage lors des reprises après siccativation.
De même, du fait de la plus grande lenteur d'évaporation de l'essence d'aspic et de la présence de vernis au copal, quoique thixotrope, donc gélifié au repos, le toucher du médium Roberson, sous l'action de la brosse, est plus fluide que celui du médium Maroger. Ce médium est donc particulièrement apprécié par les peintres désirant modeler avec aisance, expressivité et de manière prolongée une pâte souple et onctueuse.
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L'émulsion associée au médium Roberson
Atelier des Fontaines |
Et, que ce soit au médium ou à l'émulsion correspondante, en couche mince, la siccativation, progressive, intervient en quelques jours, laissant au peintre la possibilité de poursuivre son travail dans le frais le lendemain, ou de reprendre à sec dans un délai raisonnable.
A terme, cependant, la pâte enrichie de médium ou d'émulsion Roberson deviendra particulièrement dure et résistante.
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Un médium brillant et à la superbe transparence,
et fort peu coloré en couche mince (ligne inférieure)... |
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... et une émulsion onctueuse aux multiples possibilités |
Il est à noter que les colorations ambrée du médium Roberson et ivoire de l'émulsion correspondante tiennent à l'emploi dans leur composition d'une huile de lin cuite et de vernis au copal, produits de qualité aux caractéristiques bien connues.
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Le médium Roberson et l'émulsion correspondante
après quelques jours de siccativation à la lumière |
Cependant, on sait que les huiles cuites en présence d'oxydes métalliques étant devenues photosensibles, au bout de quelques jours de siccativation à la lumière, elles éclaircissent notablement.
A titre d'exemple, on peut comparer les colorations du médium Roberson et de l'émulsion correspondante fraîchement posés, ci-dessus, avec les mêmes après quelques jours de siccativation à la lumière, ci-contre.
On remarque aussi que l'émulsion, après évaporation de l'eau incluse, comme toujours, est elle-même devenue quasi transparente.
Par ailleurs, les colorations du médium et de l'émulsion, au final relativement légères, ne sont guère sensibles dans la pratique et n'ont pas dérangé les artistes qui ont utilisé ces produits. Et, quoi qu'il en soit, comme l'écrit très justement Paillot de Montabert, peintre de la fin du XVIIIème siècle - début du XIXème, dans son ouvrage : "Traité complet de la peinture, Paris, Bossange, 1829", il vaut bien mieux travailler avec une huile cuite dès l'abord colorée, mais qui tendra à s'éclaircir, que de partir avec une huile crue bien pâle qui ira sans cesse en jaunissant. En effet, usant d'un liant parvenu à son état maximum de coloration du fait de son oxydation préalable, on peut être certain que le résultat observé sur le tableau, au moment où l'on pose une couleur, ne pourra qu'évoluer dans le sens d'une plus grande luminosité. Ce que l'on peint présentement sera, au pire, ce que nos arrières-petits-enfants pourront voir. Dans les faits, ce ne pourra qu'être mieux... du moins si le choix de nos pigments a été effectué à la hauteur du choix de nos huiles cuites et de nos vernis.
Ingrédients
- Huile de lin de Suède de première pression à froid ;
- Résine mastic de qualité alimentaire en provenance directe de l'île de Chios ;
- Résine de copal dur de Madagascar ;
- Essence de lavande aspic ;
- Essence de térébenthine rectifiée de qualité supérieure ;
- Oxydes métalliques.
Pour l'émulsion, en sus : liant naturel aqueux stabilisé.
Diluants recommandés pour le médium et l'émulsion : essence de térébenthine rectifiée, éventuellement coupée d'un peu d'essence de lavande aspic si l'on souhaite accentuer l'onctuosité et prolonger le temps d'ouverture de la pâte picturale.
Quelques touches d'essai au médium Roberson Atelier des Fontaines
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Des superpositions dans le frais extrêmement aisées |
Du fait de ses caractéristiques de thixotropie, le médium Roberson Atelier des Fontaines permet de superposer très facilement, dans le frais, des touches relativement liquides sans qu'elles ne coulent, ni ne se mélangent.
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De généreux glacis au médium Roberson |
Il permet ainsi la pose de glacis très profonds et brillants, à la superbe transparence. Et, qu'ils soient minces ou plus généreux, siccativant à cœur, ils durcissent sans risque de craquelures ou frisage.
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Le médium Roberson en émulsion,
travaillé avec un blanc d'argent |
Utilisé en émulsion, le médium Roberson peut tout à la fois être modelé que travaillé de manière gestuelle. Employé avec un blanc d'argent, on retrouve la touche gaufrée caractéristique des blancs traditionnels.
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Des empâtements obtenus au blanc d'argent
additionné d'émulsion Roberson |
La pose d'empâtements extrêmement généreux est de même possible, ceux-ci siccativant rapidement et en profondeur.