"Bonjour Christian,
Quelle résine préfères-tu dans la pratique ? Ton avis m’intéresse !
Bien cordialement.
C."
La question semble simple ; le sujet est vaste ! Je ne peux le développer dans ce court résumé. Puisque tu es en possession de mon ouvrage sur les techniques à l'huile, la meilleure solution est de te reporter à chaque chapitre y faisant référence, en particulier le descriptif des différentes résines disponibles pour la peinture à l'huile.
Ceci étant, il faut déjà les différencier par leur usage : en tant que composant d'un médium, ou en vue de la réalisation d'un vernis final. Les qualités attendues peuvent être très différentes.
Si la pérennité est une caractéristique souhaitable dans les deux cas, mais très variable selon les résines, on attend surtout des premières qu'elles facilitent la manipulation de la pâte picturale, ce qui est la fonction première d'un médium. Dans cette perspective, la résine mastic est sur le podium, puisqu'elle est la seule, en mélange avec un liant au plomb, à permettre l'obtention d'un médium thixotrope traditionnel. Par contre, comme la résine dammar qui, elle, ne le permet pas, toutes deux étant des résines tendres, elles demeurent relativement fragiles, employées seules, sans huile, comme le conseillent certains, ou dosées avec excès, surtout le mastic.
Les résines de copal dur, quand on les trouve encore, ce qui est de plus en plus difficile, ont pour elles une excellente pérennité. Mais elles sont très sombres du fait de leur mode de préparation à très haute température. A n'employer, donc, que comme un apport, limité, à une autre résine plus pâle, mastic ou dammar, pour compenser leur fragilité, ou uniquement pour un travail très en clair-obscur.
L'ambre, malheureusement quasi indisponible depuis déjà plusieurs années, est le champion pour sa durabilité. On peut - ou pouvait - le trouver déjà en solution dans une huile, et dans une version relativement pâle, ce qui est extrêmement rare pour une résine aussi dure. Mais, contrairement à ce que certains prétendent, ce mélange oléorésineux ne se comporte pas de manière thixotrope. Sa manipulation n'est donc guère différente d'un médium liquide plus commun. Et, second bémol : son prix !
Et, bien évidemment, les résines de synthèse. Là, problème : depuis que BASF a décidé de ne plus proposer la résine cétonique, en usage depuis des dizaines d'années par tous les fabricants de produits Beaux-arts, c'est le black-out ! On ne sait plus ce que les médiums mentionnant leur présence mettent en œuvre. "Résine de synthèse" est devenue l'appellation unique ! La famille des résines acryliques diluables dans une essence demeure, cependant, toujours présente sur le marché. L'avantage essentiel de tous ces produits de synthèse : la pâleur. Concernant leur manipulation, chacun se fera son opinion. Personnellement, je ne les comparerai pas avec un bon médium thixotrope à la résine mastic.
Parmi les résines de synthèse, une catégorie à part concerne les alkydes. De la même famille que les résines glycérophtaliques employées pour la peinture en bâtiment, elles font de plus en plus d'adeptes parmi les peintres à l'huile. Les raisons de cet engouement : leur facilité d'emploi et leur rapide siccativation, celle-ci étant obtenue par l'apport d'oxydes métalliques. Contrairement à ce qu'indique leur court mode d'emploi, elles ne sont pas exemptes de jaunissement, mais celui-ci est, en effet, limité. Par contre, les médiums les mettant en œuvre ne sont pas vraiment thixotropes malgré l'apport d'épaississants censés leur communiquer cette propriété. Mais il faut avoir goûté à un vrai médium thixotrope pour être en mesure d'en apprécier l'écart... Par ailleurs, du fait aussi de cet apport qui limite leur transparence et leur brillant, leur emploi en glacis demeure modérément convaincant.
Pour ce qui est, maintenant, des résines destinées à la fabrication d'un vernis final, les qualités attendues sont très différentes : protection de la peinture, mise en valeur de l'œuvre, absence de modification dans le temps, capacité à se redissoudre dans le solvant d'origine en cas de nécessité de dévernissage, etc. La liste est longue ! Il faut le dire d'emblée : aucune résine naturelle ne les possède toutes ! Avec elles, les peintres ont toujours fait pour le mieux, avec des réussites partielles et de retentissants échecs. Le vernis le plus approchant, actuellement, peut être obtenu avec une résine dammar améliorée par des additifs traditionnels ou plus contemporains.
En matière de résines de synthèse, même black-out des fabricants de produits Beaux-arts. Ici encore, la résine cétonique n'étant plus fabriquée, restent toutefois les résines acryliques. Très durables, claires comme de l'eau, elles pourraient sembler idéales. Mais l'apparence plastifiée qu'elles communiquent à la peinture, d'une part, et leur manque de brillant seul compatible avec des œuvres destinées à demeurer satinées, voire mates, d'autre part, en réduisent singulièrement les domaines d'application. Je conseille, cependant, deux résines de synthèse, fort séduisantes, celles employées, dorénavant, par la plupart des restaurateurs. Mais elles nécessitent des solvants spécifiques bien éloignés de ceux employés couramment par les peintres : une résine aldéhyde et une résine hydrocarbure hydrogéné. Des vernis, donc, à composer soi-même si l'on souhaite savoir avec quoi l'on travaille.
Bien cordialement,
Christian
Date de création :21/12/2025 - 11:04Dernière modification :21/12/2025 - 14:38