"J'ai parcouru votre site ce soir un peu et je voudrais vous complimenter pour le travail accompli; depuis que j'ai pris connaissance de votre activité, je n'ai pas cessé de recommander vos produits qui me semblent d'excellente qualité."
Je vous en remercie chaleureusement. La meilleure publicité est bien celle faite par les utilisateurs eux-mêmes.
"En même temps, je ne peux pas tout acheter, je suis obligé de fabriquer un maximum moi-même, à commencer par les huiles que démucilagine moi-même - tout en étant conscient que je n'atteindrai jamais le même niveau que vous; on ne peut pas faire tout, même tout en étant intéressé par cette "cuisine" !"
Bien évidemment, il n'est pas question de commander tous les produits ! Les techniques à l'huile sont si riches qu'il convient de ne sélectionner que ceux correspondant aux recherches plastiques par lesquelles on se sent concernés. Si je connais tous les produits que je propose parce que je les ai tous testés et essayés (heureusement !), j'ai moi-même, pour mon propre usage, mes favoris.
"Je me lasse pourtant souvent de cette cuisine"
C'est peut-être là une des grandes différences entre nous. Me concernant, j'ai toujours été passionné par ces recherches depuis plus de 40 ans et, de manière intensive, depuis une quinzaine d'années.
"Je mène sérieusement ces recherches"
Je veux bien vous croire.
"Rien ne semble acquis"
Sur le fait que les recherches demeurent floues et leurs résultats inconstants, je ne suis pas vraiment d'accord. Il existe des principes qui se vérifient. Par exemple, on n'obtient pas du tout le même produit en cuisant une huile à feu nu ou en présence d'eau ; à basse ou à haute température...
Maintenant, il faut savoir que les recherches ont été menées pendant des siècles, mais de manière empirique, par essais et erreurs. D'où les recettes innombrables qui existent, parfois avec de subtiles variantes qui ont néanmoins leur importance. Je pense encore particulièrement à la délicate question de la cuisson des huiles. Exemple : avec ou sans oignon ?
L'autre point à relever est le fait que les caractéristiques des produits (huiles, résines...) fluctuent aussi. C'est le cas avec tous les produits naturels, comme les vins, par exemple. Cela ne facilite pas le travail ! Il faut le savoir et s'y adapter. Je le fais en permanence avec des surprises, parfois. Mais cela permet, au jour le jour, de progresser dans la connaissance subtile de ces produits, de leur manipulation et de leurs interactions.
Mais, et nous en avons déjà parlé, rien n'est non plus facile avec les produits issus de la chimie contemporaine, même si leurs caractéristiques sont un peu plus constantes. Le poids économique de la peinture artistique est, en effet, si faible, comparé à celui des entreprises de peinture industrielle ou en bâtiment, que les fabricants ne se soucient aucunement d'assurer la pérennité des produits qui pourraient nous intéresser. D'où le fait, par exemple, que j'ai lancé l'Association "ATP -Art et Techniques de la Peinture" dont l'un des objectifs est, précisément, par le nombre, de peser - au moins un tout petit peu - sur les choix qu'ils opèrent. Nous sommes actuellement 118.
"Vos commentaires sur la litharge mettent à plat un an de travail"
Soyons bien d'accord. Relisez mon mail : je n'ai pas dit que les huiles préparées à froid sur la litharge sont mauvaises par principe, mais qu'il faut être prudent dans leur utilisation. J'en ai déjà préparées moi-même, mais je m'en sers avec la plus grande retenue."
"Maintenant ça va faire trois ans depuis que j'ai repris (après les cinq années initiales il y a trente ans/ Wehlte); ce n'est point une critique, mais c'est dur car j'aspire seulement à avoir des bases correctes ... pour être tranquille pour travailler; quel pigment, quelle huile pour quel emploi, quel cuisson des huiles ....; less is more reste ma devise."
Que voulez-vous dire par cette devise ?
"Votre émulsion est excellente et mes propres essais avec de la gomme arabique n'ont donné que des résultats corrects; curieusement, je reviens toujours à l'émulsion ! l'huile seule est trop indécise"
Vous n'êtes pas le premier à vanter les émulsions Atelier des Fontaines. Et je vous en remercie de nouveau. Elles sont inconnues dans le commerce et je reconnais moi-même que j'ai un plaisir tous les jours renouvelé à les utiliser.
"Et le copal tend à vitrifier"
D'où le fait que je propose l'utilisation d'un peu d'essence d'aspic pour faciliter les reprises sur une couche précédente contenant du copal.
"En tout cas, comme vous l'avez expliqué avec beaucoup de diplomatie, vous avez raison de garder quelques secrets pour vous - c'est le fruit de votre travail; j'ai fait un seul essai pour essayer de dissoudre du copal dans de l'huile - j'ai tout jeté, y compris la casserole !"
La résine copal est effectivement très difficile à travailler. Je souris quand je lis certains écrits sur Internet qui proposent des recettes de vernis au copal comme si de rien n'était, sans aucune précision sur la méthodologie à suivre ! Quand on a essayé soi-même, on prend conscience que beaucoup de ce qu'on trouve sur Internet n'est que du copier-coller sans expérimentation sérieuse par derrière. Mais il en est ainsi dans bien d'autres domaines que la peinture...
Cordialement,
Christian VIBERT
"Bonsoir Monsieur Vibert,
je viens de recevoir votre colis et demain à l'atelier, votre nouveau "épaississeur" fera un miracle au blanc d'argent (Kremer) et bleu d'Outremer !"
Tenez-moi au courant. Cela m'intéresse toujours de savoir quels résultats les artistes obtiennent en utilisant les produits Atelier des Fontaines que je compose, ou ATP que je propose.
"je me permets de revenir à notre récente discussion: d'abord, je suis très heureux de pouvoir échanger avec vous de temps en temps; appréciant d'autant plus notre conversation que vous répondez certainement à un nombre très élevé d'interrogations;"
C'est aussi pour cette raison que je vous réponds par l'intermédiaire de ce Forum. Ainsi, d'autres utilisateurs peuvent bénéficier de cette conversation.
"j'essaie de comprendre et savoir / pouvoir faire moi-même un nombre nécessairement limité d'opérations; en même temps, cela me permet d'entrevoir l'envergure de vos recherches et votre fabrication - chapeau ! et idéalement, j'achèterai quasiment tous les produits chez vous mais, pour le moment, mes finances ne le permettent pas - je me paie déjà le luxe d'un atelier;"
La vie d'artiste n'est pas simple. Je vous comprends parfaitement.
"ma remarque d'en avoir marre par moments reflète une exaspération devant des approches / convictions diamétralement opposées, ce qui, à mon sens, ne peut pas avoir lieu dans une démarche quasi scientifique; exemple: la démulci ... des huiles; celle-ci fait partie des quelques postes que je peux - au moins je le crois - effectuer moi-même; je respecte totalement votre point de vue à ce sujet qui repose sur des écrits anciens et qui rejoint l'avis de Tad Spurgeon;
"en même temps, James Groves, que l'on ne peut pas à mon humble avis amalgamer à des bricoleurs (comme moi), continue à y voir un non sens; vous connaissez certainement ces deux auteurs qui, comme vous sont engagés depuis longtemps dans une "traque des recettes anciennes"; d'ailleurs, il vient de commercialiser une nouvelle (?) huile de lin et opère en fait une double volte-face: après avoir vanté les mérites de l'huile de noix, celle de lin fait un retour remarquable; secondo, celle-ci, cuite, est même utilisable pour le broyage des couleurs;"
Je connais ces deux auteurs. Ils ont chacun une approche très différente : Spurgeon focalise sur la préparation des huiles ; Groves sur celle des médiums. Me concernant, je navigue entre ces deux domaines que je considère comme totalement complémentaires : le premier pour la préparation des couleurs pour laquelle je préfère généralement l'huile de noix ; le second pour leur utilisation en situation picturale où je donne plutôt la préférence à l'huile de lin.
Quant au broyage des couleurs à l'huile cuite, pourquoi pas, mais seulement en coupage avec une huile crue. Sinon, il est difficile de parvenir à une pâte de concentration volumique pigmentaire (CVP) adéquate. Le broyage nécessite une huile relativement fluide.
"somme toute, un certain désarroi s'installe et je réalise qu'il me manquent toujours des connaissances - d'où l'impression d'une course sans fin, un peu comme l'informatique; ceci n'est point une critique car, comme vous l'avez dit, cela dépend ce que l'on cherche; mais une fois de plus, la question de démulci.. ou non me laisse perplexe dans la mesure où ce n'est point une question d'approche;"
C'est aussi pour cette raison que l'Association "ATP - Art et Techniques de la Peinture" propose des stages techniques où l'on pose les bases artisanales du Métier d'artiste peintre... Comme me le disait encore dernièrement une stagiaire travaillant à Berlin : "J'ai besoin de comprendre les fondements du métier que j'exerce pourtant en tant que professionnelle, car je passe mon temps à sauter d'une recette à une autre sans comprendre leur pourquoi. Et l'on n'enseigne plus cela dans les écoles d'art."
Concernant plus précisément la question de la démucilagination des huiles, je vous propose de consulter de nouveau la page concernant les huiles de noix démucilaginées. J'y ai placé récemment deux documents montrant des huiles de lin et de noix en cours de démucilagination. Quand on voit la quantité de mucilage présent dans une huile de première pression à froid, même préalablement filtrée sur buvard, et quand on sait le jaunissement irréversible qu'elle va inévitablement subir si on n'élimine pas ces impuretés, j'ai du mal à comprendre que l'on puisse passer sous silence cette opération, comme Yvel, par exemple, dans son ouvrage bien connu. Après, chacun fait comme il le veut... Mais la conséquence est inévitable comme on le voit, toujours sur la même page, dans les exemples de blancs broyés à l'huile que je donne à la suite.
"quant à mon propre travail de peinture - tout part à la poubelle pour le moment (depuis trois ans); je vous remercie de votre intérêt et je ne manquerai pas de vous transmettre des fichiers, avec un peu de chance dans le second semestre;"
C'est bien volontiers que je m'y intéresserai !
Cordialement,
Christian VIBERT
Rebonjour,
J'ai encore ajouté deux documents à la page déjà nommée sur les huiles de noix démucilaginées. Où vous pourrez constater, une fois de plus, pourquoi il est absolument indispensable de démucilaginer les huiles de première pression. Ce que font d'ailleurs les industriels pour les huiles à usage picturaux, mais par des traitements très énergiques qui dénaturent ces huiles. D'où, comme je l'explique, le regain d'intérêt des peintres pour les huiles de première pression. Mais alors, un traitement préalable, doux et respectueux, s'impose.
Cordialement,
Christian VIBERT
Cher Monsieur,
je voulais aussi répondre à votre dernier courriel concernant le traitement des huiles; je pense comme vous que la démulci... est nécessaire mais mon penchant (humain) de paresseux me fait rêver que James Grooves ait raison - le traitement est vraiment fastidieux ! et je continue à m'étonner que ce dernier arrive à une conclusion diamétralement opposée: même s'il se concentre sur les résines, il a travaillé quand même beaucoup sur les huiles ....
La démucilagination des huiles : un traitement gourmand en temps, c'est exact ! Or, il est bien connu que le temps, c'est de l'argent. C'est bien pour cette raison que les entreprises de produits beaux-arts travaillent soit avec des huiles industrielles, soit, et c'est nouveau, avec des huiles de première pression, mais non démucilaginées... Je pense vous avoir montré les problèmes consécutifs à cette pratique. Il reste donc deux solutions : soit travailler aussi avec des huiles industrielles, soit les démucilaginer soi-même. C'est ce que je fais pour moi et pour les peintres adeptes des produits Atelier des Fontaines. Et, puisque vous êtes au courant du travail que cela exige, vous comprendrez que le prix que j'en demande est loin d'être excessif !
je viens de mettre en pratique votre duo épaississeur / siccatif et les premiers résultats, au bout d'une semaine, sont clairement positifs ! le blanc d'argent ( mon stock de chez Kremer) et surtout le bleu d'outremer s'épaississent bien au broyage; depuis, le second n'a pas bougé dans le tube - bravo; à première vue vous avez mis au point à nouveau d'excellents produits ! en ce qui concerne le siccatif au zirconium-calcium, je ne peux pas trop me prononcer comme mes huiles pour le broyage des couleurs, à l'exception du blanc, sont lithargées à froid;
Je vous remercie de ce commentaire positif.
que pensez-vous des médiums "putty" avancés par Tad Spurgeon ou d'un manière plus générale de l'utilisation de pierres en poudre comme ajout aux pâtes ? d'un côté Mr Spurgeon cite les recherches de la National Gallery sur les pratiques de Rembrandt; de l'autre côté, James Grooves, à nouveau, met en avant que l'emploi de ce type de médium accroît artificiellement et dangereusement la quantité d'huile dans la peinture et prône, pour cette raison, une utilisation du blanc d'argent pour les empâtements ...
Que le blanc d'argent soit le plus performant pour, entre autres, poser des empâtements, c'est bien connu. Cela tient en particulier aux qualités de siccativation en profondeur liées aux composés à base de plomb.
Concernant l'utilisation de poudres minérales variées, personnellement, je leur vois un intérêt comme additif ponctuel dans le but d'obtenir des effets spécifiques, ou pour modifier les caractéristiques d'une pâte donnée ou d'un médium. J'en parle en particulier dans le mode d'emploi destiné aux médiums vénitiens. Mais je ne les recommande pas non plus comme composants majoritaires d'un médium quel qu'il soit. Il est en effet évident que, globalement translucides dans l'huile, elles ne peuvent être considérées comme des pigments, mais bien plus comme des charges. Elles accroissent donc bien la proportion huileuse sans participer à la coloration. En faible quantité, elles ont un intérêt pour leurs caractéristiques propres ; en grande quantité, elles se comportent comme les produits dont abusent les industriels pour abaisser le prix de revient de leurs peintures bas de gamme.
Cordialement,
Christian VIBERT