Rebonsoir Yoann,
"Je lisais hier dans un cahier de l’Académie Anquetin que la terre d’ombre brûlée était à fuir comme la peste en peinture, en raison de son coté migratoire néfaste dans les autres couches… J’ai été assez surpris, j’en utilise énormément dans mes dessous. Versini disant cela mesure ses mots, j’imagine. La terre d'ombre brulée est-elle si terrible ? Qu’en penses-tu, toi ?
Certains prétendent en effet que, parmi ces nombreux méfaits, la terre d'ombre migrerait de couches en couches. Ceci étant, Claude Yvel l’emploie sans hésitation. Quant à Blockx, en qui j’ai toute confiance, il propose bien la terre d’ombre brûlée dans sa gamme.
Me concernant, page 202 de mon ouvrage, j’annonce ceci :
"Terres d’ombre naturelles et brûlées PBr7 : terres semi-opaques, riches en oxyde de fer et manganèse, particulièrement celles originaires de Chypre et d’Italie. En versions naturelles, elles tirent sur le vert ; sur le rouge, en versions brûlées. Bien que souvent décriées comme tendant à repousser sous les couches qui leur sont superposées, à se dessécher de manière excessive et à noircir, leur excellente siccativité en fait des couleurs brunes non indispensables, mais fort utiles pour ébaucher en mélange aux couleurs siccativant difficilement, en particulier les tons foncés. On évitera, toutefois, de les utiliser pures, en épaisseur, et dans les couches finales."
"Camille Versini a également connaissance des bénéfices d’un bon médium qui isole et protège les pigments."
Si, effectivement, la tendance de la terre d'ombre à migrer (pour peu que cet effet soit bien avéré) t'inquiète, alors l'avis de Camille Versini concernant un médium de qualité (et elle pense, bien entendu, aux médiums thixotropes) est pleinement justifié. Car, si la pâte a été bien préparée, chaque particule pigmentaire se trouve enrobée dans le liant huileux, donc isolée de sa voisine. Et cette couche isolante est particulièrement efficace :
- premièrement, si la proportion de liant par rapport à la quantité pigmentaire n’est pas trop minime, donc si la pâte n'est pas trop maigre. En ce sens, l'apport d'un médium en cours d'exécution constitue précisément un enrichissement bienvenu de la pâte en liant ;
- Et, deuxièmement, si ce médium comporte des matériaux tendant à éviter la migration de l’huile : résine et cire en particulier. D’où, encore, l’intérêt des médiums gélifiés flamand et médiums vénitiens, qui figent très rapidement la touche picturale.
Bien cordialement,
Christian