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Forum - Sujet n°30

Sujet n°30  -  Observations
    -  par BoucharddeMonmorcy le 12/06/2015 - 22:46

Bonjour, lors de mes tests, j'ai expérimenté que le médium Maroger est bon à rien pour copier un tableau flamand comme un Rubens. J'aimerais connaitre un peintre qui a pu copier un tableau flamand avec cela...J'ai des doutes.  La National Gallery à trouvé de la résine de pin et de l'huile semi polymérisée dans la peinture de Rubens et Van dick. Il se trouve que j'ai constaté dans mes test que la résine de pin ou baume du Canada sèche complètement en une journée  si elle est broyé sans huile contrairement à la térébenthine de Venise qui reste poisseuse. Cependant, lorsque l'on mélange un peu d'huile au baume du canada le temps est beaucoup plus long. Je crois que le baume du canada isole l'huile de l'air un peu. Seul le baume du Canada sèche très vite et complètement. Je crois que le baume du Canada, résine de pin était utilisé comme vernis à retouché seul (comme le conseil Oudry de vernir l'ébauche et juste avant de terminer.) Je pense que le reste est fait avec de l'huile de soleil à la litharge ou avec un peu d'huile grasse comme Oudry et DePiles  l'indique c'est ce qui sèche le plus rapidement. Merci!


Hugues Bouchard



Réponse n° 1
    -  par ChristianVIBERT le 13/06/2015 - 07:43

Rebonjour,



lors de mes tests, j'ai expérimenté que le médium Maroger est bon à rien pour copier un tableau flamand comme un Rubens. J'aimerais connaitre un peintre qui a pu copier un tableau flamand avec cela...

 

Comme je l'écrivais encore récemment à un des mes correspondants, en réponse à sa remarque ci-dessous concernant le médium Maroger :

 

" Bref vous l'aurez compris, mon souhait est de peindre avec le médium de Rubens que l'on n'hésite pas à qualifier de sommet technique dans la peinture à l'huile."

" Rubens est, en effet, souvent considéré comme ayant poussé à son apogée les possibilités de l’huile. D’autres poursuivront dans des voies parallèles : Rembrandt par exemple. Mais, sur le plan de la virtuosité technique, Rubens est, sans conteste, au sommet.

 

Cependant, soyons clair : aucun texte ne mentionne explicitement la nature du médium de Rubens. On ne peut qu’en faire des hypothèses à partir des recettes glanées dans les documents écrits à son époque, tel le manuscrit de Turquet de Mayerne, médecin et ami de Rubens. Cependant, parallèlement aux recherches d’ordre bibliographique, il reste l’expérimentation. C’est à partir d’elle que Maroger, ancien directeur du laboratoire du Musée du Louvre, pense avoir retrouvé ce médium à travers un produit qu’il nomme « Le Rubens » et que d’aucuns appelleront à sa suite « Médium Maroger » (voir ici : http://www.atelier-des-fontaines.com/christian-vibert/articles.php?lng=fr&pg=106). C’est bien, en effet, palette et brosses à la main que l’on peut ou non approcher la pertinence des hypothèses formulées. Vous avez donc tout à fait raison de vouloir tester ce qu’il en est des médiums que je propose.

 

Sachez donc que les médiums de type flamand produits par l’Atelier des Fontaines se situent bien dans la lignée des hypothèses formulées entre autres par Maroger, et reprises par Claude Yvel, mais en diffèrent par certains points : les huiles sont préalablement cuites à haute température et subissent une seconde cuisson en présence de plusieurs oxydes métalliques, pas uniquement de la litharge. Ce faisant, les produits obtenus sont plus stables, plus onctueux, plus brillants, sèchent encore mieux et leur durabilité est encore nettement améliorée. Quant aux différentes versions, elles sont le résultat d’une variation dans les paramètres de cuisson. "

 

Ceci, Monsieur BOUCHARD, pour vous répondre que je ne prétends pas de manière catégorique, contrairement à Jacques Maroger, que le médium éponyme soit le produit utilisé par Rubens. J'affirme seulement qu'il offre un agrément de manipulation et des effets sans comparaison possible avec la plupart des médiums proposés sur la marché. D'où l'attrait qu'il a exercé tout de suite sur de très nombreux peintres, et j'en fais partie. C'est tout ! Après, chacun se fait son opinion, brosses et palette entre les mains. Le débat sur ce médium dure maintenant depuis les années 50 ! On n'a pas fini d'en parler...

 

Quant aux médiums gras flamands Atelier des Fontaines, ils sont des variations sur la base de ce médium, mais ils présentent des différences, à la fois de ressenti sous la brosse, mais aussi sur la solidité du film obtenu.

 

J'ai des doutes.

Je préfère vos doutes à vos affirmations : " le médium Maroger est bon à rien " !

 

" La National Gallery à trouvé de la résine de pin et de l'huile semi polymérisée dans la peinture de Rubens et Van dick. Il se trouve que j'ai constaté dans mes test que la résine de pin ou baume du Canada sèche complètement en une journée  si elle est broyé sans huile contrairement à la térébenthine de Venise qui reste poisseuse.

Si je comprends bien, vous broyez directement vos pigments à la résine ? Quel en est l'intérêt si vous y mêlez ensuite de l'huile ? Autant faire l'inverse. Le broyage est plus aisé...

 

Cependant, lorsque l'on mélange un peu d'huile au baume du canada le temps est beaucoup plus long.

Ce qui est logique puisque l'huile siccative par oxydation, alors que la résine sèche par évaporation de son solvant.

 

Je crois que le baume du canada isole l'huile de l'air un peu. Seul le baume du Canada sèche très vite et complètement. Je crois que le baume du Canada, résine de pin

Ou plutôt de sapin.

 

était utilisé comme vernis à retouché seul (comme le conseil Oudry de vernir l'ébauche et juste avant de terminer.) Je pense que le reste est fait avec de l'huile de soleil à la litharge ou avec un peu d'huile grasse comme Oudry et DePiles  l'indique c'est ce qui sèche le plus rapidement.

Vous noterez la complexité des appellations et descriptions dans les manuscrits anciens quand, d'une part, on vous conseille de dégraissez les huiles ; que, d'autre part, on dit apprécier les huiles grasses pour peindre... Ces écrits sont, certes, passionnants, mais il faut les considérer avec beaucoup de discernement.

 

Cordialement,

 

Christian VIBERT



Réponse n° 2
    -  par BoucharddeMonmorcy le 13/06/2015 - 18:32

Bonjour, L'huile grasse est une fausse appellation pour nommer l'huile noire, plusieurs auteurs souligne le fait que l'huile grasse est en fait moins grasse. De plus, habituellement les partisans du médium Maroger ont tendance à écarter le textes de J-B Oudry et celui de De Piles qui sont pourtant les plus fiables parce que d'époque.  Les deux disent de ne pas mettre d'huile ou très peu dans le diluant, parce que le surplus d'huile fait jaunir. ce qui est le comportement contraire au médium au mastic. Voici un extrait d'une lettre de Jacques Maroger à un ami alors que M. Maroger était à l'hôpital avec son cancer. ''Mon cher ami, vous aurez certainement de la peine en lisant cette lettre mais j'en ai bien plus à écrire : il me faut abandonner le médium. Nous n'arrivons à aucun résultat vrai ni mes élèves, ni moi. Depuis 51 comme vous le savez, j'ai consacré uniquement mon temps à ces recherches(...)'' Voila pourquoi il ne voulait pas que c'est notes soient publiées. Je crois que c'est Xavier de l'Anglais qui est plus proche de la vérité, mais il faut remplacer le Baume de Venise par le Baume du Canada. De plus, j'ai broyé du baume du Canada directement à du pigment uniquement pour tester le comportement du baume seul, ce que beaucoup n'ont jamais eu l'idée de faire... Il faut comprendre le comportement de chance ingrédient seul pour comprendre les mélanges.  


Hugues Bouchard



Réponse n° 3
    -  par ChristianVIBERT le 14/06/2015 - 09:32

Bonjour à vous.

 

L'huile grasse est une fausse appellation pour nommer l'huile noire, plusieurs auteurs souligne le fait que l'huile grasse est en fait moins grasse.

Par ce terme, ils veulent en fait signifier que cette huile a été épaissie par le traitement qu'elle a subi.


De plus, habituellement les partisans du médium Maroger ont tendance à écarter le textes de J-B Oudry et celui de De Piles qui sont pourtant les plus fiables parce que d'époque.  Les deux disent de ne pas mettre d'huile ou très peu dans le diluant, parce que le surplus d'huile fait jaunir. ce qui est le comportement contraire au médium au mastic.

Il est bien connu que toutes les huiles, a des degrés divers, jaunissent. Peindre à l'huile, c'est donc, par principe, accepter cet état de fait. Sinon, il faut choisir un autre moyen d'expression. Maintenant, il y a, bien entendu, jaunissement et jaunissement. Tant que celui-ci est modéré, ce n'est pas un problème. Plutôt que d'en faire un ennemi à combattre par tous les moyens, quitte, par exemple, à se rabattre sur des huiles jaunissant fort peu, mais siccativant très mal et donnant un film peint médiocre - je citerai l'huile de soja dont on voit user certains fabricants - il faut apprendre à en jouer. Ainsi en est-il du travail avec les huiles noires. Elles sont très sombres, certes, mais mieux vaut partir d'une huile dont :

- premièrement, on voit immédiatement l'effet sur la couleur à laquelle on l'additionne ;

- deuxièmement, dont on sait qu'elle ne pourra devenir plus sombre ;

- et, enfin,  qui ira en s'éclaircissant au séchage du fait de sa photosensibilité ;

que  de travailler avec une huile très pâle au départ, mais qui ira sans cesse en s'assombrissant.

Je ne fais ici que reformuler un conseil de Paillot de Montabert, peintre français de la fin du XVIIIème - première moitié du XIXème siècle.

 

Autre point : vous estimez que les médiums à la résine mastic seraient trop riches en huile. Ils sont, au contraire, très équilibrés de ce point de vue. Un médium trop résineux peut, en effet, amener une série de problèmes fort gênants :

- une sensibilité persistance aux solvants, non seulement à la reprise lors de la séance suivante, mais aussi en cas de restauration future, en particulier quand l'œuvre aura à être dévernie, ce qui arrivera nécessairement un jour ou l'autre ;

- un manque de souplesse, en particulier sur toile, d'où un risque accru de craquelures ;

- et vous n'éviterez pas pour autant un certain jaunissement, car toutes les résines naturelles tendent aussi à jaunir, même si le baume du Canada, dont vous recommandez l'utilisation, fait effectivement partie des produits les moins sujets à ce phénomène.


Voici un extrait d'une lettre de Jacques Maroger à un ami alors que M. Maroger était à l'hôpital avec son cancer. ''Mon cher ami, vous aurez certainement de la peine en lisant cette lettre mais j'en ai bien plus à écrire : il me faut abandonner le médium. Nous n'arrivons à aucun résultat vrai ni mes élèves, ni moi. Depuis 51 comme vous le savez, j'ai consacré uniquement mon temps à ces recherches(...)'' Voila pourquoi il ne voulait pas que c'est notes soient publiées.

On a beaucoup reproché à Maroger ses allers-retours entre diverses formules et modes de préparation pour son médium. C'est, au contraire, le propre de la recherche. Etre trop sûr de soi, affirmer une idée de manière péremptoire et  apparemment définitive n'est pas la marque d'un esprit ouvert à la recherche. L'erreur est constitutive de la démarche de recherche. Et savoir se remettre en cause est ce qui permet d'avancer.

Vous-même naviguez actuellement entre lectures et expérimentations, et vous montrez par vos écrits que vous n'êtes pas fixé sur une recette ou un mode de mise en œuvre unique.

 

Par ailleurs, si vraiment les médiums du type Maroger étaient si peu intéressants, comment expliquez-vous l'engouement qu'ils ont suscité à l'époque et le fait qu'ils continuent à enchanter tant de peintres de par le monde ? Maroger a inspiré une kyrielle d'élèves et de suiveurs. Je citerai au hasard Earl Hofmann, Joseph Sheppard ou Ann Schuler. Mais il y en a tant d'autres ! Ils ont poursuivi directement ses travaux, ou ont proposé des variantes autour des bases fournies par Maroger lui-même. Ainsi, par exemple, sont nés les fameux médiums flamand et vénitien originaux de la maison Lefranc. S'ils ont été retirés du marché dans les années 2000, ce n'est pas parce qu'ils ne donnaient pas satisfaction, au contraire, mais pour une question de législation. J'ai fait partie des nombreux peintres qui ont regretté amèrement leur disparition.

 

Il faut donc bien admettre qu'il a existé et existe encore de nombreuses variantes autour de ce médium, en particulier concernant son mode de préparation. La qualité des matériaux de départ a aussi toute son importance. D'où le fait qu'il est toujours délicat, à partir d'une œuvre mal conservée et sans en connaître vraiment les constituants, de critiquer indistinctement le médium Maroger comme s'il était unique.

 

Je crois que c'est Xavier de l'Anglais qui est plus proche de la vérité, mais il faut remplacer le Baume de Venise par le Baume du Canada.

J'ai beaucoup de considération pour Xavier de Langlais, car il a relancé l'idée que la peinture artistique est un véritable Métier qui, en tant que tel, doit être appris, donc enseigné, et ce, à une époque où celui-ci avait quasiment disparu. Cependant, ayant à mes débuts abondamment travaillé avec ses recettes, je peux affirmer que toutes ne sont pas agréables sous la brosse.

 

Par ailleurs, certaines doivent être reformulées, car elles ne donnent pas les résultats escomptés. Je pense, par exemple, à celles concernant les encollages et enduits à la colle de peau qui, aux dosages et selon la procédure indiqués, craquent inévitablement, en particulier sur toile.

 

Enfin, certains produits pour lesquels il manifestait le plus grand intérêt n'existent plus ou seulement sous des formes bien moins performantes. Citons les vernis originaux Lefranc au copal.

 

De plus, j'ai broyé du baume du Canada directement à du pigment uniquement pour tester le comportement du baume seul, ce que beaucoup n'ont jamais eu l'idée de faire... Il faut comprendre le comportement de chance ingrédient seul pour comprendre les mélanges.

Essai intéressant.

 

Cordialement,

 

Christian VIBERT



Réponse n° 4
    -  par Angelique le 23/06/2015 - 06:48

Je témoigne, pour l'avoir constaté en peignant, que les médiums à peindre à base d'huile cuite au plomb/vernis mastic (donc de type Maroger) permettent une fluidité et une souplesse d'écriture picturale proches de celles de Rubens.

J'affirme aussi qu'ils sont magnifiques et que ce sont de très performants matériaux de peintre.

Il est important de préciser avant tout autre argumentation que pour peintre exactement comme Rubens il est nécessaire au préalable de pouvoir et de savoir dessiner de manière comparable.

L'expression : « un tableau flamand comme un Rubens » est très vague lorsqu'il s'agit de matière picturale.

Il m'est évident que les maîtres des grandes époques variaient les recettes, mélangeaient les ingrédients, modifiaient les façons de faire : selon ce qui leur avait été enseigné, selon ce qu'ils ont appris ensuite, le résultat souhaité, leur sensibilité et leur instinct, leur excellence spéciale dans la maîtrise du dessin, les qualités uniques de leur bras et de leur main (par exemple : plus la main est légère et sûre et plus le dessin est maîtrisé, plus la matière utilisée peut être légère et glissante sans perte de précision), leur méthode, le sujet, le support, et mêlaient les diverses préparations.

Tous les tableaux de Rubens ne sont pas peints avec les mêmes matériaux : cela se voit en comparant ses différentes peintures.

Il y a aussi d'énormes différences de matière entre Rubens et Van Dyck.

« La National Gallery à trouvé de la résine de pin et de l'huile semi polymérisée »
Il serait constructif de citer la publication qui sert de référence à cette phrase.

Comme il s'agit de peintres flamands je pense que le terme baume du Canada prête vraiment à confusion, je lui préfère l'appellation plus précise de résine de pin.

« Je crois que le baume du canada isole l'huile de l'air un peu. Seul le baume du Canada sèche très vite et complètement. » «Je crois que le baume du Canada, résine de pin était utilisé comme vernis à retouché seul »
Je trouve, personnellement, ces affirmations très peu limpides : comme l'huile a besoin de s'oxyder au contact de l'air pour durcir, je ne comprends pas la raison de l'isoler de l'air pendant le travail de réalisation picturale, et de plus, comment isoler une couche picturale avec un vernis à retoucher, qui, par définition, se trouve en dessous ?

« comme le conseil Oudry de vernir l'ébauche et juste avant de terminer »
Dans son « Discours sur la Pratique de la Peinture et ses Procédés Principaux: ébaucher, peindre à fond et retoucher » prononcé en 1752, Jean-Baptiste Oudry ne précise pas la composition de son vernis (le mot vernis n'est pas synonyme exclusif de résine). Par contre le mot huile fut dans le passé aussi utilisé pour désigner les huiles essentielles, c'est à dire en peinture les essences naturelles : ce qu'Oudry appelle « huile de térébenthine » est très certainement l'essence de térébenthine puisqu'il explique plus loin «  parce que la térébenthine, venant à s'évaporer, les couleurs restent dans toute leur pureté », il s'agirait donc ici d'une matière volatile et non d'une résine. Dans ce passage aussi, l'esprit de térébenthine présente les caractéristiques de l'essence de térébenthine : « l'esprit de térébenthine, qui fait la base de ce vernis, s'évapore à l'instant, n'en laisse, pour ainsi dire, que l'âme » Je reviens au vernis : où Oudry indique-t-il qu'il serait composé d'une seule matière ?

« comme Oudry et DePiles  l'indique  » « De plus, habituellement les partisans du médium Maroger ont tendance à écarter le textes de J-B Oudry et celui de De Piles qui sont pourtant les plus fiables parce que d'époque. » « Les deux disent de ne pas mettre d'huile ou très peu dans le diluant »
Il est faux d'affirmer que ces textes ont été et sont écartés. A quels textes et à quels passages de Jean-Baptiste Oudry et de Roger de Piles ces phrases se réfèrent exactement ? C'est très important de préciser le texte exact quand on écrit ce type d'affirmation en citant de si grands auteurs.
De plus, je rappelle les dates : Roger de Piles (1635-1709) et Jean-Baptiste Oudry (1686-1755) ne sont ni l'un ni l'autre de la même époque que Rubens (1577-1640) ni de Van Dyck (1599-1641).



Réponse n° 5
    -  par Angelique le 23/06/2015 - 12:30

Suite du message précédent :

 

Toujours dans son « Discours sur la Pratique de la Peinture et ses Procédés Principaux: ébaucher, peindre à fond et retoucher » que conseille Jean-Baptiste Oudry, sinon d'équilibrer les ingrédients, c'est à dire de ne pas trop charger ni en huile ni en vernis lorsqu'il écrit « En ébauchant ces parties-là, il faut délayer vos teintes modérément, mais toujours avec le couteau, et se bien garder de les faire couler avec du vernis et de l'huile grasse » « J'ai connu de très-habiles maîtres qui, pour ébaucher, se contentaient de frottailler leur toile avec des brosses très-peu chargées de couleur et toujours noyées d'huile grasse. Cette pratique m'a toujours paru très défectueuse et contraire à tout bien, parce qu'elle donne à l'ouvrage un mauvais fond qui manque absolument de corps » ? Ce sont des règles de modération dans l'usage des ingrédients : il s'agit de se garder de faire couler et de noyer les teintes par l'abus d'un liant trop riche et de garder une concentration pigmentaire suffisante. En quoi ces très bons conseils invalident-il l'usage modéré d'un médium à peindre contenant un mélange d'huile cuite et de vernis composé de résine naturelle et d'essence de térébenthine ?

 

Quant aux textes de Roger de Piles, une partie de ce qui fut publié sous son nom fut largement remanié au milieu du XVIIIe siècle : d'où l'absolue nécessité de préciser de quel livre il s'agit lorsqu'on parle de cet auteur.
« Les premiers elemens de la peinture pratique » est bien paru en 1684, du vivant de Roger de Piles.
Mais les « Elemens de peinture pratique » est une édition, comme précisé dans le titre et dans l'avertissement, « Entièrement refondue, et augmentée considérablement par Charles-Antoine Jombert » (1712-1784).
Sur quel livre de Roger de Piles reposent les trois affirmations citées plus haut à propos du type de préparation d'huile, des proportions dans le diluant ?


Concernant l'édition « Entièrement refondue, et augmentée considérablement par Charles-Antoine Jombert » le texte contient au contraire des arguments favorables pour le choix des recettes de médium de type huile cuite/litharge/résine mastic. Trois ingrédients principaux des médiums à l'huile à base d'huile cuite au plomb/vernis mastic (donc de type Maroger), huile cuite, litharge, résine mastic en larmes, se suivent sur quatre pages dans ce livre, adapté de Roger de Piles et complété sans aucun doute de recettes recueillies par Charles-Antoine Jombert, l'éditeur, directement dans des ateliers de peintres, afin de rassembler un plus grand nombre d'éléments d'une tradition technique. La recette y est presque complète. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6554237r/


p141 "Huile siccative pour la peinture" : "L'huile qu'on appelle siccative, est très commune et fort en usage dans la peinture : sa composition est des plus faciles. Ce n'est que de l'huile de noix cuite à petit feu dans un pot de terre avec de la litarge bien broyée avec la même huile (...)"


p143 "Huile à broyer les couleurs pour résister aux injures de l'air" : "Prenez deux onces de mastic en larmes bien claires et broyez les avec de l'huile de lin. Versez ce mélange dans un pot vernissé que vous mettrez sur le feu : vous y ferez fondre peu à peu le mastic (..)"


p143 "Huile grasse ou siccative pour les couleurs" : "Délayez dans un demi-septier d'huile de lin et un demi-verre d'eau, gros comme la moitié d'un oeuf et de couperose blanche; ajoutez-y autant de litarge d'or et autant de mine rouge, et enfin gros comme une petite noix de blanc de plomb broyé à l'huile. Faites bouillir le tout lentement pendant une heure et demie. (...)"


p144 "Pour faire de l'huile grasse en une heure" : "On peut faire de l'huile grasse ou siccative en très peu de temps, en broyant de la litarge d'or avec de l'huile de noix; après qu'elle est bien broyée, on fait bouillir le tout sur le feu l'espace d'un demi-quart d'heure (…)"


Et dans « Les premiers elemens de la peinture pratique », publiés du vivant de Roger de Piles, je n'ai rien lu qui invalide l'usage d'un médium à peindre de type « Maroger ».

Quant à citer un fragment de lettre d'un artiste courageux affaibli par une maladie grave, ce n'est pas non plus un argument convainquant pour discréditer un matériau dont la qualité fut et reste évidente et précieuse pour beaucoup de peintres qui l'ont utilisé.

On peut préférer peindre avec d'autres matériaux ou vouloir explorer d'autres pistes mais l'utilisation d'huile cuite au plomb, d'essence de térébenthine et de résine mastic, avec toutes leurs variantes de mise en oeuvre, est vraiment loin d'être une fantaisie de partisans.



Réponse n° 6
    -  par Angelique le 23/06/2015 - 13:00

Fin du message :

 

Pour conclure ce message, entre autres témoignages de la valeur de ces recettes traditionnelles et des recherches qui y ont été et y sont toujours liées, Rubens ou pas Rubens, l'excellent livre de Joseph Sheppard (élève de Jacques Maroger) "Peindre comme les grands maîtres", traduit en français et toujours publié actuellement aux éditions OSKAR, où sont données et décrites, avec les détails de composition et de fabrication, deux autres variantes des médiums incorporant directement la résine mastic en larmes à chaud dans l'huile cuite (au plomb), suivies des démonstrations très intéressantes de leur utilisation en peinture faites par l'auteur.



Réponse n° 7
    -  par Angelique le 30/06/2015 - 16:53

« La National Gallery à trouvé de la résine de pin et de l'huile semi polymérisée »
 
Est-ce le bulletin technique numéro 20 de 1999 consultable ici ?
http://www.nationalgallery.org.uk/technical-bulletin/technical-bulletin-volume-index

Car une partie ce bulletin est citée dans cette conversation où il est aussi question de résine de pin et des écrits de Jean-Baptiste Oudry :
http://www.atelier-des-fontaines.com/christian-vibert/thread.php?lng=fr&pg=246&fid=1&cat=2



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