Bonjour M. Vibert,
Bonjour à vous. Vous m'excuserez de ne pas vous nommer. Certains ne supportent pas qu'on puisse les identifier sur la scène publique... De mon côté, vous comprendrez que je me serve des mails que je reçois pour que d'autres peintres fréquentant ce site puissent bénéficier des commentaires que je prends le temps d'écrire.
Je suis une peintre amateur et depuis ce matin, j'ai découvert votre site de l'Atelier des Fontaines. C'est un site remarquablement fait et très pédagogique. Si vous n'étiez pas si loin de chez moi, je prendrais bien des courts à l'Atelier des Fontaines ! Les démonstrations à l'aide des "Works in progress" m'ont vraiment conquises.
Je peins du figuratif avec la technique à l'huile gras sur maigre. Le medium que j'emploie (hormis pour la première couche de peinture, souvent très claire car je fais du portrait) est constitué d'essence de térébenthine rectifiée et de vernis à retoucher surfin (Le tout chez Lefranc Bourgeois) + une toute petite quantité d'huile de lin vieillie au soleil : les couches de peinture peuvent être alors opaques ou transparentes, ces dernières allant du plus clair vers le plus foncé). J'utilise beaucoup le modelé ensuite avec brosses sèches pour créer des zones de transitions douces et je n'aime pas du tout voir les traces des brosses rester figées une fois la couche de peinture sèche, surtout pour un portrait.
Cependant, je rencontre un problème avec mon medium lorsque je dois faire de grandes zones (Un fond par exemple repris en glacis). Comme sa composition est relativement maigre pour avoir des couches très fines...
Je vous reprends sur ce point. J'ai le sentiment que vous confondez deux notions qui n'ont rien à voir dans les faits : épaisseur / minceur de la couche picturale ; gras / maigre. Une couche picturale peut être à la fois mince et grasse, ou maigre et épaisse. Ce qui différencie le gras du maigre n'est pas une question de minceur ou d'épaisseur, mais de composition de la pâte picturale : quelle est la proportion d'huile (le composant gras) par rapport aux autres composants (pigments, résine, cire, liant aqueux...) qui, eux, représentent la partie maigre ? On peut très bien ébaucher très épais et très maigre, par exemple avec une émulsion, et reprendre très gras et très mince avec des glacis oléo-résineux. Le meilleur exemple de cette manière de procéder est celui donné par Rembrandt.
- si je veux le reprendre ensuite par un glacis transparent( le lendemain voire une semaine plus tard) parce que je veux remettre de la couleur par dessus par exemple, le risque est grand de faire des "trous" dans la dernière couche et, plus je mets des couches, plus le risque augmente...
Je comprends bien : votre ébauche étant trop maigre et trop résineuse du fait d'un médium basé sur un vernis à retoucher (ce qui n'est pas son rôle), vos superpositions tendent à décrocher votre première couche.
- ou bien je m'envoie beaucoup pour avoir une uniformité de teinte sur une large zone : cela fait des "paquets" plus foncés par endroits et comme la zone est grande, il est difficile d'uniformiser les dernières zones sans effacer les sous couches en dessous de ce "paquet".
Une pâte dont la proportion de résine est prédominante sur la proportion huileuse manque effectivement d'onctuosité ; d'où des modelés difficiles.
- Il sèche très (trop) vite.
Disons, plus exactement, que votre couche picturale prend trop vite. Son temps ouvert est trop court. Une fois encore, c'est la composition de votre pâte qui en est la cause.
Vous vendez plusieurs types de medium et du coup, au vue de ma description ci-dessus, pourriez-vous me conseiller celui qui pourrait le mieux correspondre à l'usage que je voudrais en faire ? Il me semble que le medium Flammand onctueux (comparé à "tirant", moyen, siccativité renforcée) serait celui que je choisirais (avec l'émulsion car je suis curieuse d'essayer ces possibilités associées) mais je n'en suis pas certaine et je n'ai pas bien compris les différences de possibilités et d'applications entre :
- medium Flammand Atelier des fontaines
- medium Flammand Maroger Atelier des fontaines
- medium Roberson Atelier des fontaines car les deux derniers sont peut être aussi corrects pour moi...
J'ai bien compris qu'ils étaient différents en composition mais qu'elles sont les conséquences sur la peinture ou sur la manière de peindre ?
Je vous remercie du temps que vous voudrez bien prendre pour me répondre. Si vous pouviez faire un petit tableau comparatif (tout comme vous l'avez fait pour comparer avec les mediums du commerce mais en rajoutant les conséquences sur la peinture ou sur la manière de peindre, les effets de vos différents médiums), ce serait parfait : je sais, je suis un peu exigeante alors qu'on ne se connaît même pas...:)
Bien cordialement
C...e
Si vous consultez les pages consacrées à la description des différents médiums, en particulier : "Les quatre versions du médium flamand et de l'émulsion", vous aurez déjà une idée de ce qui différencie ces produits. Ceci étant, je vais essayer, dans les jours prochains, de vous rédiger un tableau comparatif plus explicite. Je vous demande un peu de patience.
Quoi qu'il en soit, je vous remercie déjà pour votre long courriel et l'intérêt que vous manifestez pour le site et les produits Atelier des Fontaines.
Cordialement,
Christian VIBERT
Bonjour M. Vibert,
Merci pour votre réponse très rapide. Je comprends bien que ma demande va demander un peu de temps pour une réponse adéquate car je sais aussi que l'utilisation d'un produit dépend de ce qu'il y au-dessous, au-dessus, de comment on l'emploie et avec quel outil...et aussi de la personne qui l'emploie.
Vous avez tout à fait raison.
J'ai appris à confectionner le médium que j'utilise en atelier mais c'est un médium très (trop) délicat d'emploi. Par contre, quand toutes les conditions sont réunies, le résultat a une finesse incroyable.
Me concernant, je considère qu'un produit abouti doit à la fois permettre d'obtenir le résultat attendu, mais aussi d'y parvenir avec une relative facilité. Les produits et techniques des Anciens étaient à la fois performants et de manipulation aisée, loin de la complexité qu'on a trop souvent voulu associer à la technique à l'huile.
J'avais essayer de le remplacer par de l'huile de lin cuite (seule) mais le résultat était beaucoup plus grossier : je ne sais pas comment décrire mais en gros j'avais l'impression que les pigments se mettaient par paquets au lieu de se poser uniformément en surface. Si je peux obtenir le même rendu sans tous les inconvénients avec un de vos médiums, ce sera magique.
Il y a de multiples manières de cuire les huiles : température et durée de cuisson, à feu nu ou en présence d'eau, à l'air libre ou sous vide, seules ou en présence de composés métalliques ; sans compter la nature des huiles elles-mêmes et leur état préalable d'oxydation. Tous ces paramètres influent sur les résultats. Vous avez des huiles cuites très épaisses, tirantes, s'étalant de manière uniforme ; d'autres filantes, onctueuses ; certaines gardant mieux la touche ; la plupart siccativant vite, voire très vite, mais d'autres beaucoup plus lentement même qu'une huile crue... Il faut les choisir ou les préparer en fonction de ce qu'on en attend.
Une chose est certaine pour moi, je sens arriver la fin de mes petits problèmes car j'ai trouvé un interlocuteur, vous, et sans doute aussi un produit qui me convienne. Impossible de dialoguer avec les grands revendeurs de produits car souvent ils ne peignent pas ou n'enseignent pas et ne comprennent pas ce qu'on leur raconte.
Je vous suis parfaitement. Même les enseignes fort connues ne délivrent des informations qu'au compte-gouttes.
Le fait de joindre aux produits un mode d'emploi extrêmement complet (4 à 6 pages) et de pouvoir dialoguer, de préférence à partir de ce Forum, fait aussi partie des particularités de l'Atelier des Fontaines. Par ailleurs, l'Association "ATP - Art et Techniques de la Peinture" organise régulièrement des cours de dessin et peinture. Je comprends bien que votre éloignement ne vous permette pas de les suivre. C'est pourquoi nous proposons aussi, régulièrement, des stages de pratique picturale. Ceux-ci permettent d'apprendre à composer soi-même un certain nombre de produits, d'en maîtriser la mise en œuvre, d'élargir ses pratiques techniques, en particulier de découvrir les possibilités de la technique mixte et, surtout, de comprendre leur pourquoi, de manière à être capable de progresser, ensuite, de manière plus autonome, libéré entre autres des contraintes liées à l'emploi exclusif des produits formatés du commerce.
Je peux vous envoyer en pièce jointe un tableau en cours si cela vous aider à me répondre.
Bien volontiers.
Cordialement,
Christian VIBERT
Rebonsoir,
Avec ce tableau très complet, je comprends mieux que le médium vénitien de par sa matière légèrement grenue ne va pas me convenir.
Je m'en doutais ! Objectivement, je pense que vous devriez essayer soit le médium flamand en version onctueuse, soit le flamand en version Maroger. Et, si vous souhaitez goûter aux possibilités de la technique mixte, prenez en même temps les émulsions correspondant à ces médiums.
Par ailleurs, je vous conseillerais vivement de choisir la présentation sous forme de flacons plutôt que la formule standard en tubes. Par le mélange des trois liquides : huile cuite et vernis mastic pour le médium, et l'ajout du liant aqueux pour l'émulsion, vous obtenez des produits analogues à ceux conditionnés en tubes. Avec, en sus, trois avantages :
- Vous pouvez doser l’huile et le vernis selon la consistance que vous souhaitez donner à votre médium : plus ou moins onctueux ou tirant ; et ajouter plus ou moins de liant aqueux à votre émulsion pour obtenir une émulsion plus ou moins maigre et épaisse.
- Votre médium et votre émulsion sont toujours dans un parfait état de fraîcheur. Vous pouvez, par exemple, en composer une petite quantité à utiliser durant la semaine ou le mois. Vous les stockez dans deux petits pots bien bouchés.
- Le prix proposé est, proportionnellement, moins élevé car, personnellement, le fait de devoir entuber les produits me prend beaucoup de temps. Donc j'accorde la préférence à un conditionnement en flacons.
Et ne craignez pas que la confection des produits soit complexe. Par un simple dosage soigné et un vigoureux mélange, vous obtenez le résultat souhaité. Sachez, d'ailleurs, que, parallèlement au mode d’emploi, j’envoie un supplément très complet en 5 pages où je fournis des conseils de dosage variés selon les résultats que l’on souhaite obtenir.
Enfin, vous avez la satisfaction de travailler avec des produits entièrement personnalisés.
Les temps de siccativité me vont tous car je ne suis pas pressée et je préfère prendre le temps de faire bien les choses si c'est le medium qui me convient.
J'ai par contre un peu de doute sur ma compréhension du qualificatif « tirant » :
- est-ce que cela veut dire qu'on a du mal à l'étaler ?
- ou que le film de peinture se tend lorsqu'il siccative et que du coup, on ne voit plus les marques du pinceau ?
et aussi sur «matière différenciée entre ombre et lumière » : est-ce que cela veut dire qu'il faut prendre le médium pour l'ombre et l'émulsion pour la lumière ou bien que la texture de la surface de la peinture sera différente en fonction d'une exposition du tableau à la lumière ou à l'ombre ?
Mes réponses ont été ajoutées sur le tableau comparatif des médiums et émulsions Atelier des Fontaines.
Vos remarques ont l'intérêt de m'obliger à clarifier ce qui, pour moi, est une évidence ! Je vous en remercie.
Désolée de vous faire encore travailler. Encore un grand merci pour votre aide.
Comme convenu, le tableau en cours pour lequel il manque encore pas mal d'ombre sur le personnage et pour lequel j'ai eu beaucoup de difficulté à placer un glacis transparent sur le haut. Les zones A et B (devraient montrer mais c'est difficile quand on grandit l'image) montrent des nuances + claires et sombres que j'aurais voulu uniformes.
La facture de votre travail, de type hyperréaliste, confirme mon impression. Je vous conseille d'essayer le médium Maroger.
Cordialement,
Christian VIBERT